Politique

La trahison de la Primaire populaire

J’ai soutenu la Primaire populaire. J’étais d’accord avec ses constats, ses principes et sa méthode.

Je me suis inscrit, j’ai fait un don d’argent, j’ai participé à une réunion locale, je me suis déclaré volontaire pour organiser un bureau de vote. Je me suis préparé à tracter en prévision de l’échéance.

Et puis le calendrier se décale en janvier. Décision incompréhensible. Je continue cependant à suivre le processus. Fin janvier, je vote.

La place majoritaire attribuée à Christiane Taubira me surprend. Pas tant sur le plan des idées mais sur le choix d’une candidate sans moyen et sans parti.

Allons-y, me dis-je, je suis engagé moralement et la personnalité de Taubira me va bien – gageons que son absence de programme valait ticket pour une assemblée constituante ?

Et à ce moment commence une histoire pas claire de constitution de quelque chose pour continuer on ne sait pas trop quoi. Une association. Oui, mais quels statuts ? Pour quel projet ? Le but de notre association de fait n’est-il pas accompli, et donc notre groupement dissout ?

Il y a élection de représentants des militants actifs de la Primaire. Grand bien leur fasse. Mais ces gens votent subitement hier, se croyant investi·es d’un pouvoir de décision au nom de la Primaire populaire.

Ils sont 30, nous étions 400 000.

Et ces 30 gens votent pour le 3e candidat choisi par ces 400 000. Et non pour le 2e, ce qu’imposait la logique du vote majoritaire.

Quand on veut vendre la démocratie, on en a un échantillon sur soi

L’association « 2022 ou jamais » nous fait aujourd’hui une Valls !

La logique à laquelle se soumettent les partis politiques, c’est la logique délétère de la jungle : je dois être le plus fort en éliminant mes ami·es avant de prétendre à la maigre chance de combattre mes ennemi·es. L’association « 2022 ou jamais » se vassalise finalement à cette logique. Alors que la Primaire populaire avait posé un tout autre enjeu sur la table ! Quand cesserons-nous ce raisonnement contre nature ?

Ce choix constitue à l’évidence une trahison du vote des 400 000 personnes engagées pour changer enfin le jeu politique. Encore une trahison, identique à celles des partis politiques en place ! Mais celle-là est encore plus perfide car elle touche au processus démocratique lui-même.

La décision de l’association « 2022 ou jamais » n’appartient qu’à elle, je n’en suis pas membre. Ce sera 2022 mais plus jamais ça pour moi.

J’ai déjà eu l’occasion au sein du Parti Pirate de dénoncer les abus de pouvoir au sein de structures politiques se voulant transparentes et démocratiques. Le cas est tellement fréquent qu’on peut se demander s’il ne s’agit pas là tout bonnement d’une fatalité.

Il faut du temps pour apprendre. L’histoire nous prouve que nous apprenons si lentement en ce qui concerne la démocratie, la bienveillance et la paix !

L’organisation en parti politique n’est pas un acte positif. La pensée anarchique a largement développé cet aspect : le pouvoir gangrène aussi bien les structures militant pour des rapports nouveaux au pouvoir !

Les partisans du vote blanc le disent : on ne vote pas avec son bulletin mais avec ses pieds.

Voter avec ses pieds, c’est aussi se cantonner à une action politique réelle, incarnée et à portée de son corps et de sa voix. Une action qui dilue les délétères distinctions entre le militant pur et le militant impur, entre les militants gagnants et les militants perdants, entre les candidats et les votants : je suis tous ceux-là.

2 Comments

  1. Je partage très largement ton analyse!!!
    Et pour avoir partagé également certaines expériences militantes, j’ai envie d’ouvrir en citant Pierre-Joseph Proudhon dans Solution du problème social (cela ne date pas d’hier):
    « La République est une anarchie positive. Ce n’est ni la liberté soumise à l’ordre comme dans la monarchie constitutionnelle, ni la liberté emprisonnée dans l’ordre, comme l’entend le Gouvernement provisoire. C’est la liberté délivrée de toutes ses entraves, la superstition, le préjugé, le sophisme, l’agiotage, l’autorité; c’est la liberté réciproque, et non pas la liberté qui se limite; la liberté non pas fille de l’ordre, mais mère de l’ordre.  »

    Ouvrage que je vais lire dans son entier 🙂

  2. Bonjour Yves, pourrais-je avoir votre adresse mail, j’ai quelque conseils à vous demandez concernant des ateliers philosophiques.
    Je suis un jeune amateur de philo essayant de régler le problèmes de l’isolement chez les jeunes de 15-30 ans en situation de difficultés psychiques.

    Evan Presse
    lamargemauve@gmail.com

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